« Tu ne deviendras jamais chef. » Charles a 17 ans et est en troisième année d’école de cuisine quand il entend ces mots. Il vient de perdre son bras gauche après un accident de scooter. Après un long séjour passé à l’hôpital, ce passionné de cuisine est heureux de reprendre le chemin des cours… jusqu’à ce que son professeur principal lui annonce son intention de le faire redoubler. L’apprenti cuistot s’y oppose : « Je lui ai dit que son job était de me réintégrer dans sa classe, et le mien était de trouver une alternance. » Ni une, ni deux, Charles dégote un stage dans les cuisines de Joël Robuchon, puis, après une année sabbatique dont il avait besoin, intègre celles d’Alain Ducasse et Potel et Chabot. Preuve qu’avec son bras bionique, il excelle derrière les fourneaux : « Je ne peux peut-être pas travailler dans la minutie aussi vite que les chefs étoilés, mais je peux éplucher les carottes plus vite que n’importe qui grâce à ma main articulée à 360°. »
Aujourd’hui, le chef de 28 ans exerce dans un bistro de la Creuse et s’apprête à ouvrir une brasserie à Paris. Quand on lui pose la question de l’employabilité, il met son parcours en avant pour prouver que les personnes en situation de handicap ne sont pas des personnes amoindries inaptes à exercer : « Quand j’ai été amputé, on m’a dit que je ne pourrais plus jamais être cuisinier, que je ne pourrais plus faire telle ou telle chose. En réalité, à part applaudir ou me ronger les ongles, je ne vois pas ce que je ne peux pas faire… »