Au lycée Eugène-Delacroix, à Drancy, Jérémie Fontanieu a développé la méthode « Réconciliations », qui met à contribution les élèves autant que leurs parents.
« Zéro décrochage scolaire et 100 % de réussite au bac »… Un slogan qui peut paraître racoleur, mais qui témoigne pourtant de votre réussite, à vous et vos élèves, depuis cinq ans maintenant. Quel est le secret du projet Réconciliations ?
Ce projet pédagogique consiste à coopérer davantage et établir un dialogue constant avec les parents d’élèves. Nous échangeons chaque semaine par sms : je leur transmets les notes, les écarts de conduite, les retards, et leur rappelle que leurs enfants doivent réviser à la maison. De leur côté, les parents m’informent de l’évolution ou des difficultés de leurs enfants, mais aussi d’évènements extrascolaires pouvant affecter leurs résultats, par exemple.
J’ai l’impression qu’être un prof compétent ne suffit pas aujourd’hui, tout comme être un parent compétent. En revanche, l’alliance des deux peut faire des étincelles et permettre à ces ados d’exprimer pleinement leur potentiel. La méthode peut paraître simple vue ainsi, mais ce n’est pas ce qu’on apprend dans notre formation de prof. Cela fonctionne, pourtant : petit à petit, les élèves se mettent à réviser chez eux, n’arrivent plus en retard ou n’oublient plus leurs affaires.
Comment ce projet est-il né ?
J’ai connu une première année compliquée en tant qu’enseignant. J’étais stagiaire et j’avais l’impression de me faire écraser par mes élèves et par l’Institution. J’avais la sensation d’être seul et impuissant, mais je gardais l’idée folle que si je travaillais dur, je pouvais devenir ce prof charismatique qui allait faire rêver et réussir tous ses élèves, un peu comme dans Le Cercle des poètes disparus… On a tous cette idée-là du « bon prof ». Mais, au final, on est seul face à nos élèves. On a beau tenter des choses, on a la sensation que rien n’est fait pour que l’on y arrive. C’est pour cela qu’il y a du décrochage chez les profs également, même chez celles et ceux dont c’est la vocation. Il fallait donc que je trouve une solution pour ma survie dans la profession. À mon arrivée au lycée Eugène-Delacroix, à Drancy, j’ai commencé à être un peu plus sévère et à mettre en place des évaluations hebdomadaires.
Cela fonctionnait plutôt bien, mais ce n’était pas suffisant. Les élèves ne révisaient pas suffisamment à la maison. Au vu de leurs facultés, c’était un gâchis de potentiel énorme. Je me suis alors demandé qui pourrait avoir assez d’influence pour les secouer ? Et, un jour, j’ai pensé aux familles…