La pandémie mondiale et la guerre en Ukraine nous rappellent avec violence que les expériences traumatiques font partie de la vie humaine. Dans son livre Le guérissage, publié aux éditions Tana, la psychothérapeute marseillaise Marie Caiazzo propose un chemin de guérison inspiré des sagesses autochtones d’Amérique du Nord, pour sortir de la peur, apprendre de nos épreuves et mettre du sens dans notre vie. Entretien.
Comment avez-vous découvert la philosophie amérindienne ?
En 2015, les attentats à Paris m’ont fortement affectée. Alors que je me débattais avec des angoisses terribles, et un trouble anxieux généralisé, j’ai découvert l’approche de Dominique Rankin, un chef héréditaire algonquin – l’une des premières communautés autochtones du Québec -, au cours d’un stage organisé en France qui m’a apporté une nouvelle compréhension de la guérison. Cet homme, qui a été envoyé comme de nombreux enfants autochtones dans des pensionnats catholiques dans les années 50, a vécu l’enfer : le viol, la terreur, l’humiliation. Pendant des années, il a sombré dans l’alcool et la violence, avant de trouver la paix à travers la sagesse de son peuple. Il partage un témoignage vibrant au sujet de la vie, du respect, du pardon et de la guérison. À travers la découverte de cette sagesse universelle, j’ai expérimenté à quel point la parole accueillie dans la bienveillance et sans jugement libère. L’expérience traumatique peut devenir une source d’enseignement et une richesse, si on accepte de ne plus avoir honte de ses émotions et de son vécu.
On parle beaucoup de résilience, vous parlez de « guérissage », quelle est la différence ?
Notre capacité de résilience nous aide à faire face aux épreuves, c’est un outil, qui peut conduire sur la voie de la guérison, mais ce n’est pas la guérison. La guérison est l’accès à la paix intérieure après une expérience traumatique. J’ai identifié quatre étapes sur le chemin qui mène à cette paix que j’ai appelé « le guérissage » : nommer l’expérience, transformer son regard, accepter son vécu et entrer dans la métamorphose. C’est un processus qui nous amène à traverser nos émotions, à prendre conscience de nos forces et à donner du sens à ce qui n’a aucun sens.
Beaucoup de personnes sont en quête de sens depuis la pandémie mondiale…
C’est tout à fait normal. La pandémie nous a ramené à notre spiritualité. Nous pensions contrôler le monde, et nous découvrons que le monde est inconstant, impermanent, instable. Cette prise de conscience questionne le sens que nous donnons à notre vie. C’est pour cette raison que de nombreuses personnes ont choisi de changer de travail ou de déménager afin de se reconnecter à des valeurs qui font sens. L’expérience traumatique nous pousse à nous questionner sur le sens de la vie. Elle nous pousse à traverser la peur, la colère, la tristesse, pour retrouver le flux de la vie et réaliser que nous pouvons être heureux à nouveau.
À lire : Le guérissage, de Marie Caiazzo. Tana éditions.